Newsletter n°23 – février 2023

Il faut s’accepter comme sujet faillible pour aimer l’autre et la vie.

Thomas Vinterberg, Drunk

Qui ne fait pas d’erreur? Dans le travail du bois, personne. Il y a, bien sûr, les « erreurs de débutant », celles qu’il faut absolument commencer par faire, au moins une fois, pour comprendre les fondamentaux. Il y a ensuite les erreurs qu’on sait être en train de faire, mais que l’on fait quand même en espérant que « ça passe »… et souvent, ça ne passe pas, on se demande alors pourquoi on a fait ce que l’on savait pertinemment être une erreur. Il y a les erreurs d’impatience, les erreurs de précipitation : plus on veut aller vite, et plus on perd de temps à les rattraper, faisant de nouvelles erreurs. Il y a les erreurs que l’on a déjà faites, mais qui ne nous ont pas vacciné : on les refait. Ce sont les erreurs typiques, qui ne sont pas forcément des erreurs de débutant, mais qui s’invitent un peu partout. Couper la partie que l’on doit laisser entière, par exemple, et inversement. Erreur bête, mais qui explique pourquoi tous les menuisiers, les ébénistes, les charpentiers, marquent leur bois au crayon pour indiquer les gestes à effectuer. On croit qu’on a « tout dans la tête », qu’on sait parfaitement ce qu’on doit enlever ou laisser, qu’il faut faire dix fois la même chose, qu’on ne se trompera pas… mais si. A force de faire ce genre d’erreurs, on se range à l’évidence : le seul moyen de les éviter, ce n’est pas de se concentrer davantage, c’est juste de marquer le bois, point. Il y a, enfin, l’erreur qu’on n’avait pas vue venir, celle qui est passée inaperçue dès le début du processus de fabrication, et qui ressurgit beaucoup plus tard, compromettant toute une partie du travail accompli… « mais qu’est-ce que j’ai foutu?!! » s’écrie-t-on la tête entre les mains. Erreur de calcul, erreur de mesure, erreur d’orientation ; on est incapable de se l’expliquer, mais elle est là, bien là, il est trop tard. C’est pourquoi, comme le chirurgien ou le pilote d’avion, on se doit de tout vérifier, tout le temps, à chaque étape du processus, plusieurs fois, même – surtout – quand cela paraît inutile.

Quand le mal est fait, impossible de remonter le cours du temps… mais on peut toujours essayer de corriger l’erreur, la rattraper, la masquer,l’intégrer, ou, dans le meilleur des cas, s’en servir pour faire mieux en changeant ses plans. Cela demande de se creuser la tête, et malheureusement, on ne trouve pas systématiquement de sortie par le haut. Inutile, alors, de s’acharner, de s’en vouloir, ou de se décourager : il faut simplement recommencer tout de suite, et, mentalement, effacer l’ardoise. Quoiqu’il en soit, aucune erreur n’aura été un échec : elle nous aura appris. A fabriquer, et au passage, à nous accepter comme faillible.